L'appartenance, une valeur désuète dans un monde d'égocentrisme et d'isolement grandissant
Quand l'appartenance voulait dire quelque chose.
Il y a quelques jours, Guy Lafleur, cet extraordinaire joueur du Canadien de Montréal nous a quittés après avoir perdu son combat contre un cancer récidiviste.
En écoutant les reportages et témoignages fusant de toutes parts, je me rappelai que la société au sein de laquelle M. Lafleur évoluait était clairement différente de celle d'aujourd'hui.
À cette époque, il y avait un fort lien d'appartenance qui existait et prévalait sur l'ego personnel des individus.
Pas uniquement dans le sport professionnel mais également, au travail et dans les communautés.
Il semblerait que nous ayons quelque peu perdu depuis, cette valeur qui faisait de nous des gens de coeur, de courage et surtout de principes.
Plus rien n'a d'importance maintenant, si ce n'est que notre ego!
Au hockey, à cette époque, les joueurs étaient fiers de porter leurs uniformes. Ce n'était pas la paye qui primait mais le club.
Au sein du monde du travail, il en était de même. C'est pourquoi les syndicats étaient si forts. On se battait pour l'ensemble des employés, pour un but commun.
Tout çà a bien changé et ce, principalement depuis la démesure salariale dans les sports professionnels mais, pour le commun des mortels, c'est l'avènement de l'internet et de toutes les nouvelles technologies qui succédèrent qui ont modifié notre ADN.
Nous n'avons désormais plus besoin des autres pour survivre. Ce n'est que pour socialiser et encore là, il ne faut pas que çà dérange trop nos habitudes de vie. On change de relations comme on change de caleçons.
Je me souviens que lorsque j'étais enfant, les plus âgés, mon père et mes oncles racontaient des anecdotes sur la façon dont les gens réglaient les problèmes au sein de leurs communautés et comment ils faisaient les choses.
Je me remémore particulièrement comment ils réglaient le cas des batteurs de femme. Pas question d'appeler les autorités, les hommes du quartier, se regroupaient et rendaient une petite visite au belligérant. En général, çà se réglait assez rapidement.
De nos jours, on tourne la tête en mentionnant qu'on ne veut pas d'ennuis!
Dans les sports c'était similaire, lorsqu'un joueur sortait du cadre, avait la grosse tête ou faisait du tort à l'image de l'équipe, çà se réglait dans la chambre entre les périodes, mais çà se réglait entre joueurs.
Je ne prône pas la violence pour régler nos problèmes, loin de là mais, sommes-nous devenus une société de "mauviettes" sans principe ni valeurs.
On fait tout pour ne pas être dérangé par les problèmes de nos voisins. Cependant, lorsque l'ambulance sonnera à trois heures du matin et réveillera tout le quartier, venant chercher la voisine à demi-inconsciente suite à une rage de son conjoint, comment nous sentirons-nous?
Pour sûr, certains diront: On aurait donc dû faire quelque chose. Nous savions que çà n'allait pas!
Comprenez que je ne lance pas de blâmes sur personne. Je fais également partie du lot.
Ces lignes me font prendre conscience que tout est interrelié. Tout ce qui se passe autour de nous, finit toujours par nous toucher un jour ou l'autre, d'une façon ou d'une autre. Nous serons dérangés.
Où est donc passé notre fierté, nos liens d'appartenance à cette société, à notre quartier, notre employeur?
Lafleur vient d'une époque révolue. Pratiquement d'un autre univers au sein duquel l'ego n'était pas maître!
Ce lien d'appartenance passait par un minimum de respect envers les autres, ce qui n'est plus aujourd'hui.
La réalité du monde du travail actuel
Il ne se passe pas une semaine sans que quelqu'un ne se présente pas à une entrevue, n'avise pas et disparaisse sans nouvelles. D'autres, acceptent des emplois et ne se présentent même pas au travail. Sans compter les non-retours d'appels ou textos.
Il semblerait que la norme soit désormais: pas de réponses = pas d'intérêts.
Quel respect envers les gens qui prennent du temps pour eux?
Le pire, c'est qu'on ne peut rien y faire. Personne ne veut régler ce problème grandissant. On tourne la tête pour ne pas avoir d'ennuis et que dire de nos instances gouvernementales qui elles, ne veulent même pas en entendre parler car ce sera du travail en surplus!
Où est passé ce lien d'appartenance à une société de valeurs?
Le travail n'est tout simplement plus une valeur. Ce n'est qu'un mal nécessaire afin de survivre et payer nos comptes.
Il ne faut pas se surprendre que les entreprises tendent vers un fonctionnement exigeant un minimum d'employés.
Les gens s'insurgent contre les nouvelles pratiques d'entreprises, ils militent contre la robotisation, l'automatisation, mentionnant que çà coupe des emplois et bien, désolé mais c'est maintenant la façon optimale pour une entreprise de prospérer à long terme. Les employés ne sont pas fiables.
Les employeurs en ont assez de perdre un temps précieux afin de satisfaire des employés sans respect, ni lien d'appartenance.
Au travail également, dans le passé, lorsqu'un employé n'était pas fiable et manquait de respect envers son employeur, ce sont les autres employés qui le ramenait à la raison. Il y avait un respect entre collègues et envers l'employeur.
Un vieux dicton mentionne: " On ne crache pas sur la main qui nous nourrit"
Aujourd'hui, ce dicton n'a plus aucune résonance dans notre société dite civilisée.
Notre futur
Nous avons un gros problème d'identité, de valeurs et de principes sur les bras en ce moment et, malheureusement, ce n'est que le début.
Le travail tel que nous le connaissions est dans un mouvement de grands changements que nous verrons au cours des prochaines cinq à dix années à venir.
La pandémie de Covid a accéléré ce changement de façon exponentielle et beaucoup plus rapidement que ce que le marché du travail peut gérer.
Les pénuries de main-d'oeuvres ne sont pas prêtes de disparaître et çà va augmenter, au contraire.
Le télétravail est une façon de contrer le manque de personnel mais, en même temps, cela crée un manque ailleurs dans d'autres secteurs d'activités.
Les gens qui se tournent vers le télétravail, créent des manques dans les industries utilisant des travailleurs manuels.
Les nouvelles générations de travailleurs ne sont plus intéressées à travailler physiquement pour un salaire égal ou moindre de ce qu'ils peuvent gagner en demeurant chez eux, en ne travaillant qu'une fraction des heures.
Ils peuvent aisément gagner le même salaire de 40 heures en ne travaillant que 2 heures par jour, avec un ordinateur, de n'importe où dans le monde, en vendant des produits via internet.
Qu'est-ce que les entreprises peuvent faire contre cela? Rien!
Pour les industries nécessitantes de travailleurs manuels, des métiers manuels, les seules et uniques voies à long terme, passeront par la robotisation et l'émigration. Pas vraiment d'autres options.
Alors, pour en revenir au lien d'appartenance, on peut oublier çà. Ce ne sera pas demain la veille où çà redeviendra à la mode.
Les technologies nous ont isolé les uns des autres. Au départ, de façon sociale et maintenant çà se transpose dans le monde du travail. C'est une réalité pour laquelle il nous faut nous rendre à l'évidence; nul ne peut prédire comment çà va se terminer!
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